Perchée sur mes dix cm Louboutin, je fais les cent pas devant l’hôtel Costes où j’ai rendez-vous avec la rivale de toutes les clubbeuses : Cathy Guetta.
Chihuahua et Louis Vuitton
11h07, elle débarque chihuahua en poche version sac à chien Louis Vuitton, s’excuse aimablement de son retard et me propose un petit déj que je ne saurais refuser. Eye liner parfait, bouche en vinyle rouge Chanel, crinière de feu, ça impose le respect.
Première question : Vous êtes toujours accompagnée de votre chien en interview ?
« Oui, c’est ma nouvelle devise : jamais sans mon chien, Platine, c’est David qui me l’a offert, il me permet de garder un lien avec lui ».
Je me retrouve nez à truffe devant un bébé chihuahua qui n’a qu’une seule envie : faire joujou avec ma jambe droite. Son regard est brillant, il est joueur, son poil blond. Plus je le regarde et plus je comprends pourquoi Cathy aime ce chien. En diagnostic psy, on appellerait ça « transférer l’object d’amour sur un animal » mais on en est qu’à la première séance.
Alors bon, j’enchaîne.
Dans votre livre [“Bains de minuit”, éd. Fayard], vous confiez que la première fois que vous êtes entrée dans une boite de nuit, vous vous êtes sentie chez vous.
« Oui, parce que pour moi qui avais passé mon enfance à danser devant mon miroir, découvrir un lieu dédié à la danse, c’était le paradis. Et puis les lumières tamisées atténuaient mon acné tardive. Tout à coup, parce que je dansais bien, les regards se portaient sur mes formes et non plus sur mon visage ».
Cathy me raconte une version modernisée de Cendrillon et je redoute le moment où, comme le carrosse, elle se transformera en citrouille.
C’est là que vous rencontrez David ?
« Bon, David, c’est le coup de foudre, le prince charmant des boites de nuit, le Roméo du clubbing. Dès que j’ai vu son visage angélique [elle rit], j’ai eu le coup de foudre… D’ailleurs je dois vous avouer quelque chose que je n’ai dit à personne, la première fois que je l’ai embrassé une black light a explosé au-dessus de nous… Si ça c’est pas un signe ! ».
Après ses spots, elle me parle de néon… J’ai l’impression que la lumière n’est pas à tous les étages.
A part vos problèmes dermatologiques, j’ai entendu dire que ça n’a pas toujours été facile ?
« On a vécu longtemps dans une chambre de bonne. À Saint-Tropez, où on travaillait pour la saison, on était carrément SDF. On dormait dans des hangars à bateaux puis sur les banquettes du Papagayo. On sentait le poisson mais on était heureux ! ».
Après le point Biactol, je rentre dans le vif du sujet.
Que sont devenus vos amis, vous avez dû susciter des jalousies ?
« On était toute une bande à vouloir se faire une place dans le monde des nuits parisiennes. Ceux qui ne nous ont pas suivi nous ont reproché de ne pas les avoir aidé à gravir la montagne. Mais on ne pouvait pas à la fois grimper et les porter ! Nos économies ont été englouties dès la première soirée au Bataclan. Ce fut un fiasco, il a fallu tout reprendre à zéro. David a travaillé en tant qu’équipier chez Mac Do et moi je vendais des bonbons et des cigarettes aux Bains Douches pour remplir notre frigo ».
Donc vos amis ?
« Aujourd’hui, je peux dire que notre mode de vie ne permet pas non plus de cultiver l’amitié, alors je préfère en louer quand j’en ai besoin. Vous savez il y a toujours deux ou trois mannequins dans les backstages qui sont ready pour gagner un billet… En deux ans, j’ai dû faire trois fois le tour du monde. Difficile en pareil cas d’avoir de vrais amis ».
Je suis sous le choc, fracture de l’oreille droite, la femme d’affaires montre les dents. Tout compte fait, Cathy ressemble plus à Cujo de Stephen King qu’à Duchesse dans les Aristochats.
J’éteins le magnéto et je la laisse monologuer pendant que je finis mon Tiramisu qui dans mon cas pourrait se transformer en «j’ai envie de me tirer dessus». Professionnelle jusqu’au bout, je feins un rendez-vous dans les 20 minutes, attrape mon manteau et saute dans un taxi. J’abandonne donc la belle à sa bête, parce que les contes de fées ça n’existe que chez Disney.
Ciao bella !
